Une mort digne pour les animaux d’élevage, c’est possible…

Les informations rapportées hier par la presse concernant notre régie municipale d’abattoir ont été, et à juste titre, source d’une grande émotion et de beaucoup d’interrogations chez nos concitoyens.

unknownNotre groupe a adressé immédiatement un courriel au maire (transmis à la presse) pour demander que tout la lumière soit faite.

Plainte a été déposée par l’association L214 au parquet de Limoges. La Mairie assure quant à elle que l’abattage de vaches gestantes est parfaitement légal. L’abattoir est un prestataire de service; les animaux ne lui appartiennent pas, il n’a donc aucune obligation de pratiquer un « test de grossesse » à leur arrivée. La seule obligation concerne les propriétaires des animaux qui ont interdiction de transporter des vaches dont la gestation est supérieure à 50 jours. La préfecture a confirmé que ce type d’abattage est conforme à la législation française et communautaire.

Nous verrons bien ce qu’en dira la justice mais l’enjeu essentiel ici n’est pas d’abord juridique. Les salariés de l’abattoir municipal font un travail difficile et l’abattoir de Limoges a été classé parmi les meilleurs en Europe par une récente commission européenne. L’enjeu va donc bien-au-delà du droit puisque en tout état de cause le droit autorise ces pratiques: l’enjeu porte fondamentalement sur notre rapport aux animaux, au monde vivant et à notre environnement… Bref sur le type de société que nous voulons.

Des champs à nos assiettes, il faut changer de modèle. Dans son volet agriculture-alimentation, l‘Avenir en commun, le programme de la France Insoumise note que « le modèle agricole productiviste actuel détruit tout: l’écosystème, la santé des consommateurs et celle des paysans ». On pourrait ajouter: il détruit même, légalement, la dignité des animaux d’élevage. L’agriculture écologique que nous prônons se donne ainsi également pour objectif le respect du bien-être des animaux d’élevage. Elle passe par un plan national permettant d’accompagner l’ensemble des agriculteurs dans la transition écologique de l’agriculture, basé notamment sur l’arrêt des projets de fermes-usines; la redéfinition des normes d’élevage (densité, aire de pâturage) en vue du respect de la condition de vie des animaux d’élevage; l’amélioration et l’application effective de la réglementation sur les conditions d’abattage, afin de limiter au maximum la souffrance animale et de rendre possible l’abattage à la ferme. Il va de soi qu’un tel plan de transition intégrera le devenir des salariés dépendant directement de  l’agriculture tels ceux des abattoirs (à l’image de la transition énergétique et de la sortie du nucléaire qui ne peuvent se faire qu’avec les salariés du nucléaire).

Ces propositions de la France Insoumise ne tombent pas des nues. Elles convergent avec bien d’autres.

« Nous savons tous qu’à un moment donné l’animal va être sacrifié. A mon sens, il ne peut y avoir d’élevage sans abattage. Le problème est celui de la mort digne de l’animal », a indiqué à l’AFP Mikel Hiribaren, secrétaire général de la Confédération paysanne.« Une mort digne pour les animaux d’élevage c’est possible », explique Jocelyne Porcher, directrice de recherches à l’INRA.  Des pistes de propositions sont avancées comme celle d’abattoirs mobiles, à la ferme ou via des plate formes collectives reliées à des abattoirs locaux.

Enfin, cette affaire a mis aussi en évidence le rôle crucial des lanceurs d’alerte puisque c’est par un lanceur d’alerte, Monsieur Mauricio Garcia-Pereira que cette question a été mise dans le débat public. Je salue ici le courage de ce salarié. « Il faut protéger les lanceurs d’alerte et investir les salariés d’une mission d’alerte sociale et environnementale » propose à fort juste titre l’Avenir en commun. Pour ma part, en tant que membre du Conseil d’Administration de l’Abattoir, j’ai adressé au nom de mon groupe un courrier au Président du CA demandant sa réunion d’urgence notamment pour auditionner ce lanceur d’alerte et j’ai demandé qu’aucune sanction ne soit prononcée à son encontre. 

(3 commentaires)

    • Jean-Pierre Frachet on 5 novembre 2016 at 15 h 15 min
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    La non soutenabilité pour notre écosystème de continuer sur la pente d’une alimentation bien trop abondamment carnée est une réalité qui commence à émerger dans les consciences, et c’est heureux.
    Cela n’a pas de rapport univoque avec les techniques d’abattage. Cependant, une agriculture de plus en plus intensive, industrielle, avec des marges dérisoires voire négatives pour les producteurs en temps de crises, ne peut que favoriser l’aggravation des conditions de vie des animaux.
    Il faut alors imaginer les conditions de vie des éleveurs confrontés à ces situations impossibles. Ne jamais l’oublier, le malheur des hommes ne peut faire que le malheur des animaux et leurs sorts sont liés à travers le type d’agriculture que nous choisissons.
    Autre aspect : c’est une raison de plus de refuser le libre échange, CETA, TAFTA et compagnie, pour les productions agricoles. En plus de pousser à plus d’industrialisation, ce serait un bonus accordé au moins disant ; quelles sont, quelles seront les conditions d’abattage, et d’élevage pour les viandes nord-américaines les plus compétitives, celles qui viendront se substituer aux produits de nos élevages auxquels nous voulons voir appliquer les normes les plus étiques, donc les plus coûteuses ?

    • CLAIR on 5 novembre 2016 at 19 h 52 min
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    en parlant avec un paysan philosophe… celui ci m’a dit: c’est le productivisme qui est coupable.

    c’est aussi consommateur de devenir consom’acteur

    et raisonnable ( le mot décroissant faisant peur ) il semble que cela soient des laitières vues à la télé… besoin de trésorerie… crise du lait alimentée par les grands groupes et les grandes surfaces… le tafta/ceta/elena ne vont rien arranger !!!

    consommateur redevient acteur,locavore,raisonnable, et si tu prends du bio privilégie le local

    ASSURONS LA PROTECTION DES DONNEURS D’ALERTES

    • Patrice Thomasse on 19 novembre 2016 at 9 h 24 min
    • Répondre

    Bien sûr il s’agit plus particulièrement d’un problème moral, je dirais de morale fondamentale, celle, à partir de notre éducation de notre sensibilité qui nous fait juger inacceptable les pratiques (à plus forte raison) légales des abattoirs. Ce mépris écoeurant pour le processus de la vie dérangerait le débat politique par sa proximité avec celui de la sacralisation du vivant ? Peut-être.

    Le débat n’a donc pas lieu, l’affaire est étouffée dans le ventre démocratique, la lame effilée du désosseur l’ouvre et le glisse à la poubelle.

    Il s’agit bien d’une affaire humaine au meilleur sens du terme : pour gagner sa vie un hommes fait à longueur de journée ce que sa morale réprouve. Il décide de prendre à témoin ses coréligionnaires ( aîe le vilain mot !). Réponse : silence.

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